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Le suicide virtuel d'un ami

Tant d'années nous unissent, lui et moi. Tant d'années que lui-même voulait mettre en verbe : un penseur de chez lui et moi penseur de bien loin. On se salue dans nos langues "Azul" et "Egun", on se dit amis et faisons tout pour l'être. On s'échange et échange. L'un est soi-disant analphabète, l'autre un peu plus instruit, peut-être au sens de l'autre. Lui me contacte des ses cimes et moi de bien moins haut. Un jour, alors que je commentais une soupe de campagne mijotant sur un feu de bois et que je déplorais son absence, il fit sa dernière apparition sur Facebook où l’on vient pour flâner en ces termes : "Et il est là le bougre, mon ami. Il a humé le fumet... Mais juste le fumet de l'amitié car la soupe n'est bonne et simple que bien entourée et avec des produits frais. Il y a bien longtemps je disais que je n'étais pas seul à me consacrer à l'internet. Mon obstination a eu très vite raison des bonnes volontés, et maintenant je n'ai plus que mes dix doigts pour en faire vivre bien peu d'intérêt. Il n'y a personne à chercher ni à juger derrière mon clavier, qu'un opiniâtre Salaber en croisade contre la médiocrité". Et il s’en alla rejoindre ses montagnes pour se consacrer à l’animal, quittant ainsi ce monde consumériste. Faut-il parler chien pour se faire entendre ? Eh bien oui, c’est ce qu’a fait mon ami et ça a fonctionné. Comment et pourquoi cet ami en est-il arrivé là ? Je vais essayer de faire une intrusion dans son univers et tenter de comprendre les motivations qui l’ont poussé à s’intéresser à l’animal après moult réflexions sur l’hominidé et le végétal. Inventif subtil, fin connaisseur dans beaucoup de domaines, mon ami n’avait pas besoin de s’encombrer d’une science supplémentaire pour s’intéresser à l’éthologie (comportements des espèces animales dont celui du chien en particulier), si ce n’est sa soif de découvrir et d’en savoir plus sur tout ce qui bouge. Donc, après avoir bûché sur le comportement humain et quelques mystères qui l’enveloppent, il a fait une escapade dans le monde végétal qui s’est soldée par des découvertes significatives en botanique. Mais, c’est méconnaitre ce chercheur que de penser qu’il allait faire une pause dans son potager et se contenter de développer ses recherches. Non, il ne pouvait pas s’y attarder et passer tout son temps avec les plantes qui bougent mais qui ne parlent pas, il lui fallait trouver autre chose pour convaincre. Et le voilà, je le cite : "j’ai juste fait une incursion chez les animaux non humains pour prendre de la distance avec les comportements inhumains dont seul l’homme est capable". Ce passage que j’ai repéré dans un extrait de son livre, suffit à provoquer bien des tentations. J’imagine que son dernier livre sur le chien qu’il qualifie d’homme pas comme les autres, n’est que le préambule d’une série dont il est le seul à en connaitre la finalité. Cet auteur qui n’est pas comme les autres, sait de quoi il parle quand il écrit sur facebook : "après la castration du chien on se propose de lui greffer des testicules en silicone afin qu'il retrouve son "estime de soi". Voilà qui serait pas mal pour les violeurs en série... Ensuite, la mode est à la rhinoplastie ou comment refaire le museau de son chien. Pour déguiser un pitbull en cocker ? Puis, le lifting des paupières pour lui "ouvrir le regard". De quoi avoir envie de coller quelques yeux au "beurre noir" à leurs propriétaires, histoire de leur ouvrir le regard aussi... Il y a aussi le botox pour lui enlever les rides et la liposuccion pour la graisse. A quand les mamelles PIP ? " Comme quoi, rien n’arrête l’Homme d’innover dans sa funeste activité depuis qu’il s’est dressé debout sur ses deux pattes postérieures. L’homo erectus aurait mieux fait de rester sur ses quatre pattes, question d’éthique et de conformité vis-à-vis de son statut d’hominidé. Et cet homo-sapiens avec sa jugeote, que n’a-t-il pas inventé comme fourbi pour se faire du mal ? Et pour couronner le tout, voilà qu’apparaît "ecce homo" pour défier toute les lois de la nature, faisant fi de son statut d’être humain. Franchement, on ne sait plus dans ce méli-mélo si c’est l’homme qui est descendu du singe ou l’inverse. Et même si cela étant, serait-il descendu trop top ou trop tard ? La réponse est chez l’ancêtre Adam qui n’est descendu de nulle part et qui a clos le débat. Dans tout cela, il y a de quoi perdre son latin et se mettre à hurler comme un loup et à lever la patte comme un chien. Ce n’est pas tant l’animal et son comportement qui intriguent, mais le genre Humain qui continue à s’identifier à son plus proche allié. Les termes empruntés au monde animal et qui sont repris trop souvent dans nos conversations, invitent à s’interroger sur cette relation qui existe entre les deux espèces. ➝ Lire nos 5 ans d'amitié Internet